" Libro della natura degli animali, XIIème "
"J'ai du reconnaître que ce que j'appelais autrefois mon âme, n'avait absolument pas été mon âme, mais une construction doctrinale sans vie. Il a donc fallu que je parle à mon âme comme à quelque chose de lointain et d'inconnu qui n'existe pas par moi mais par qui j'existe. » Le Livre Rouge de C.G. Jung."
En fait, nous faisons ce
que fait le corbeau sur l’image : nous élargissons notre ciel
au fur et à mesure que nous allumons des étoiles(1).
C’est un travail de
conscience que nous sommes loin de faire en toute conscience, tant
une bonne part de ce travail nous échappe complètement(2).
Car que maîtrisons-nous exactement dans ce
travail de l’âme ? Qui travaille ? Habitons-nous ou
sommes-nous habités ?
Dans ce travail de la
conscience qui cherche, explore et grandit ; il nous revient
d’apprendre à d’abord inviter bien plus qu’à décider.
Car en invitant nous ouvrons la possibilité que quelque chose que
nous n’ayons pas prévu advienne ; alors qu’en décidant,
nous posons bien sûr des actes mais sans savoir exactement si « ce
qui a décidé » est réellement le plus légitime et le plus
pertinent.
Et comme nous sommes
multiples, pour ne pas dire surpeuplés de l’intérieur, poser la
question de qui décide en soi, revient à poser la question de :
« de quel endroit en ce moment suis-je en train d’agir ? ».
Suis-je en train d’agir (penser, faire, vouloir etc…) à partir
de l’enfant triste en moi ? Suis-je en train de le faire à
partir de ma zone de frustration ? De ma part conquérante ?
Rêveuse ? Le fais-je à partir de ma part rationnelle ou de mes
capacités d’intuition ? Comment savoir si ce qui décide en
soi est réellement en phase avec ce que j’ai besoin pour me
sentir heureux, en paix et dans mon plein potentiel ? Par qui et
par quoi suis-je agit ? Par une part qui me veut du bien ou par
une autre bien plus toxique ?
C'est pourquoi beaucoup
d’injonctions dans la littérature du développement personnel, du
type « soyez vous-mêmes », « prenez les bonnes
décisions », « devenez maître de votre vie »
fonctionnent plus comme des incantations que de réelles aides à
grandir. Car elles impliquent d’avoir au préalable les bonnes
réponses à ces questions.
Par ailleurs, il y a derrière ces
injonctions une vision mécaniste et fonctionnelle de la psyché
humaine que les faits contredisent constamment. La psyché humaine ne
fonctionne pas dans une sorte de rationalité mathématique de bon
aloi. Elle procède par symbolisation ritualisation, intuitions,
gestation et fulgurances. Elle est comme un être vivant, un animal
protéiforme qui vit sa propre vie en fonction de ce avec quoi nous
le nourrissons. Pour paraphraser Jung parlant de l’âme, nous
existons par lui, bien plus qu’il n’existe par nous. J’aime
cette idée que nous sommes habités d’une présence, d’un appel,
que nous pouvons appeler « âme » avec lesquels nous
co-élaborons nos existences. Que nous nous séparions d’eux, que
nous ne les respections pas dans leurs besoins, et alors nos vies
peuvent devenir désolation (Et notre époque qui s’en est coupée
pourrait si elle le pouvait en témoigner).
Nous devons donc agir à
partir de ce quelque chose qui est un peu plus que nous-mêmes. Cette
part qui est ce que nous sommes profondément, mais bien plus encore.
La question étant dès lors : comment la trouver et
l’identifier ? Comment se connecter à notre totalité -ou
pour le moins, à notre appel profond- celui qui connaît nos
besoins, le chemin qu’il conviendrait que nous empruntions ?
Celui qui ne nous mènera pas sur des pistes infructueuses ? En
fait, nous nous posons souvent de bonnes questions mais ne les posons
pas toujours à la part de nous qui saurait y répondre ! Ou
bien encore, nous la posons en ayant décidé au préalable de la
réponse à donner !
Entrer dans cet espace
d’écoute « d’un inconnu à découvrir » exige à la
fois pieds sur terre et tête dans les étoiles, ainsi qu’une
capacité à trouver alors que nous ne savons pas exactement quoi
chercher. C’est un travail d’ouverture de portes et de possibles,
une danse avec l’incertain et l’improbable, un cheminement avec le mystère. C’est une
invitation à laisser entrer quelque chose que dans un premier temps
nous n’appréhendons pas. L’acceptation, suivie d’un abandon,
qu’en nous repose un potentiel qui sait ce vers quoi nous devons
aller pour notre accomplissement le plus haut.
Entrer sur ce chemin,
c’est comme entrer dans une matrice dans laquelle la métaphore
physiologique est on ne peut plus opérante : gestation,
attente, digestion, préparation, mise au monde, évacuation,
respiration, cycles, mise au monde, vision, aveuglement… Tout un
lexique du vivant qui est celui de la psyché et de l’âme.
Pas de chemins tout
tracés, pas de plannings prévisionnels, la psyché décide de ses
rythmes et de ses besoins. Elle exige aussi silence et retrait du
monde. Elle impose ses cycles à la raison. Et puis, entrer dans cet
espace, c'est accepter de rendre caduque une immense part des
questionnements qui nous agissaient auparavant, comme un grand
nettoyage par le vide !
Je suis sur ce chemin-là.
En ce moment, peu de mots, peu de projets à courts termes, et même
peu de créativité. Une graine germant en terre, invisible à l’œil
et silencieuse au monde. Être pour un temps un potentiel en devenir, un incertain sûr de lui. Je vous tiendrai
au courant des premières pousses…
(1) : En fait, à
bien regarder l'image après coup, il se pourrait que l'oiseau -au
contraire- cache peu à peu les étoiles. Mais comme ce n'est pas ce
que j'ai vu en premier, je ne change pas le texte !
(2) :
Actuellement, les neurosciences affirment que 96 % du fonctionnement
de notre cerveau échappent à notre fonctionnement conscient !
Magnifique...
RépondreSupprimerOn pourrait dire aussi cela ainsi : "Est-ce nous qui avons une âme" ou n'est-ce pas plutôt notre âme qui "a un corps" ?
Nous sommes plus "grands" que nous ne l'imaginons et tout le travail intérieur consiste à dépasser nos conditionnements et à re-contacter cette part de nous qui nous dépasse et nous gouverne, qu'on peut appeler de différents noms, mais qui est, en quelque sorte, notre "Moi supérieur"...notre Soi.
Merci pour derniers articles abordent , de façon nuancée, deux thèmes qui me sont chers...
Je m'intéresse beaucoup à la psychologie jungienne et l'image du "fil" est à l'origine de tous mes blogs, y compris du dernier...:-)
http://lefildariane1234.blogspot.fr/
Oups...je voulais écrire : "Merci pour tes derniers articles, qui abordent, de façon nuancée, deux thèmes qui me sont chers..."
RépondreSupprimerJe les ai trouvé si intéressants, d'ailleurs que j'ai repris, sur "Fil d'Ariane", ton dernier article, en intégralité, sans rien changer...avec ta signature et avec un lien jusqu'ici, évidemment.
RépondreSupprimerSi cela te pose un problème, n'hésite pas à me le dire...
Amicalement.
Bonjour la Licorne ! Je voulais répondre à vos premiers commentaires, et puis, négligence et débordements d'activités obligent, je ne l'ai pas fait. Vous dire à quel point cette proximité d'âme et d'intérêt me touche et m'est précieuse. Parfois, comme tout le monde je pense, il m'arrive de douter... Alors des messages comme les vôtres sont de vrais cadeaux ! Pour le partage, je suis enchanté ! Merci de votre présence et merci pour vos écrits et vos partages que j'apprécie beaucoup aussi !
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